Bienne: des manifs aux frais du contribuable

Un policier fait partie d’un comité référendaire opposé à un règlement de police qui met les frais sur le dos du contribuable en cas de débordement.

Branle-bas de combat à Bienne autour de la révision partielle du règlement de police locale. Alors que la loi cantonale prévoit qu’une commune peut facturer les frais d’intervention de la police à l’organisateur et aux participants en cas de débordement, les parlementaires biennois ont ajouté un alinéa 7 à l’article 20, au nom de la liberté d’expression et de réunion: c’est la Ville qui paiera la police.

Dans une motion adoptée en 2020, la gauche demandait que la Ville «s’abstienne aussi à l’avenir de refacturer des frais de police lors d’événements à visée idéale, politique ou non commerciale». Autrement dit, comme l’a résumé «Le Journal du Jura», si un mouvement de gauche ou de droite organise une manifestation non autorisée et que des violences émanent de celle-ci, les frais de police ne doivent pas être réglés par les organisateurs, mais par la Ville.

150 francs/heure

Question posée lors des débats: quand la Ville n’autorise pas une manifestation, et que la police doit être présente, est-ce aux contribuables de payer? «À 150 francs par heure et par agent, je vous laisse imaginer le montant de la facture totale», a relevé le parlementaire Luca Francescutto (UDC). Pour ce policier, «si des individus ne respectent pas les interdictions de manifester, il est normal qu’ils payent les frais de police engendrés en cas de débordements».

Et le juge Maurice Paronitti (PLR) de souligner que «de toute façon, le montant maximal facturé aux organisateurs est plafonné» à 10 000 francs et «dans des cas particulièrement graves», à 30 000 francs. «Il s’agit d’une mesure préventive pour lutter contre la violence, pas d’une punition», a expliqué Maurice Paronitti.

Référendum lancé

Ce matin, un comité interpartis a lancé un référendum a été lancé contre cette révision du règlement de police. Les signataires sont invités à refuser de payer les frais de police lors de manifestations violentes. Il s’agit de rassembler 1520 signatures d’ici au 22 janvier 2023 et permettre au peuple de se prononcer sur cette modification.

Le comité référendaire estime qu’«il n’est pas acceptable de déresponsabiliser les individus qui participent aux actes délictueux lors de manifestations ou les organisateurs qui ne font pas les démarches pour obtenir les autorisations requises».

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L’avis de Luca Francescutto (UDC), policier et parlementaire

Quelle est la dernière manifestation qui a dérapé à Bienne?
Je n’en ai pas le souvenir, on sait se tenir à Bienne! Entre activistes et policiers, il y a un respect mutuel. Jamais un défilé de squatters n’a dégénéré en bataille rangée, comme à Berne ou à Bâle.

Comment s’explique cet apaisement?
L’ouverture au dialogue, c’est notre force. Partout, la police a bien évolué dans sa relation au public et sa proximité avec le citoyen. Le problème des villes comme Berne et Bâle, c’est d’être confrontées aux noyaux durs des black blocs.

Sans manifestation nationale, est-ce moins risqué?
Avec l’alinéa 7 de règlement révisé, il pourrait y avoir avec des extrémistes de gauche et de droit… Ne pas faire payer les frais aux organisateurs, c’est un appel d’air! Le message est «Venez à Bienne», on ne vous enverra pas de facture.

Le débat oppose-t-il la gauche à la droite?
La gauche dure réfute les choix démocratiques et tentent de les contourner à coups de motions et de postulats. Ses élus sont persuadés qu’une interdiction de manifester est un déni de démocratie, comme si on ne pouvait plus exprimer ses envies ou ses revendications.

Ce n’est pas vrai?
À Bienne, 99% de demandes de manifestations sont acceptées, puisqu’elles émanent d’organisateurs fiables dans le respect des conditions posées. Mais quand c’est non, c’est non! Quand une manifestation est interdite et que l’organisateur passe outre, il ne devrait pas pouvoir le faire aux frais du contribuable. À sa place, un enfant recevrait une claque…

Source: Vincent Donzé, Le Matin